Les élections en Birmanie suscitent la critique de la communauté internationale
Dimanche dernier en Birmanie, la victoire des forces armées a soulevé une vive critique de la communauté internationale qui souligne l’échec d’une tentative d’instauration d’un semblant de démocratie. Le Parti de la solidarité et du développement de l’Union (USDP) créé par la junte birmane pour la représenter aux élections législatives de dimanche et mené par Than Shwe affirme avoir remporté plus de 80% des sièges du Parlement tandis que les partis d’opposition, la Force démocratique nationale – une émanation de la Ligue Nationale pour la Démocratie – et le Parti démocratique ont concédé leur défaite. Barack Obama a insisté sur le fait que le processus électoral n’était « ni libre, ni juste » et a demandé la remise en liberté de Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la Paix, ainsi que de 2100 autres prisonniers politiques. Hillary Clinton a même appelé à la constitution d’une commission internationale devant laquelle les leaders birmans pourraient répondre des nombreuses atteintes aux droits de l’homme perpétrées depuis la mise en place du régime.
Ironie du sort : les élections birmanes sont décrites par les leaders militaires comme un passage obligatoire vers la démocratie. Rappelons que la Birmanie est un des pays les plus répressifs et fermés au monde. Lors des élections précédentes, en 1990, la Ligue Nationale pour la Démocratie menée par Mme Suu Kyi l’avait largement emporté mais le gouvernement militaire avait volontairement ignoré les résultats et condamné Mme Suu Kyi à quatorze ans d’emprisonnement ; elle est actuellement assignée à résidence et appelle à un boycott de ces élections. Si les Etats-Unis, l’Europe et l’ONU insistent sur les irrégularités du processus électoral et le manque de transparence du régime, certains observateurs comme les pays de l’ASEAN notent cependant un « important pas en avant » pour la démocratie en Birmanie. La Chine, allié crucial de la Birmanie tant par les relations commerciales (elle est de loin le premier investisseur en Birmanie, en particulier pour les ressources naturelles, ainsi que le premier fournisseur d’armes au régime) que politiques par son soutien renouvelé devant les instances de l’ONU en raison de son statut de membre permanent au Conseil de Sécurité, souligne que les élections « montrent un changement dans le pays dirigé par les militaires ».
Il est effet légitime de poser cette question : doit-on considérer les premières élections birmanes depuis vingt ans comme une mascarade visant à conforter la position de la junte militaire au pouvoir, ou peut-on y voir une ébauche de démocratie civilisant le régime militaire et ouvrant la voie à la mise en place progressive d’une véritable démocratie ? Le fait est qu’aucun contrôle de scrutin n’a été mis en place, que la constitution birmane réserve un quart des sièges parlementaires à des militaires nommés, que les journalistes étrangers ne peuvent toujours pas passer la frontière, et que la Chine a tout intérêt à appuyer le régime militaire…